6 questions à : Solène Hervieu

Solène Hervieu a étudié la langue de Shakespeare avant de devenir infirmière puéricultrice. Mais c’est avant tout une artiste qui touche à tout. Chant, cinéma, dessin… ce sera finalement le théâtre qui la mènera vers l’écriture.

Aujourd’hui, elle vit près d’Orléans où elle se consacre à ses trois enfants et à l’écriture. Son premier roman, Un été en hiver, paru chez City Éditions est une invitation au voyage et à la tendresse.

Elle nous parle ici d’écriture, d’inspiration et d’édition.


3 questions sur l’écriture

Quels conseils d’écriture d’auteurs chevronnés aux auteurs débutants te font tiquer ?

Je crois que le plus paralysant c’est le conseil du type : « écrivez tous les jours à la même heure quoi qu’il arrive. » J’ai toujours envie de dire que ces gens-là n’ont pas de famille ni de vie personnelle. Et que moi, à 4 heures du matin, je dors ! Bon, j’essaie de caler des heures pour écrire mais c’est flexible en fonction des impératifs…

Sinon, « cibler votre lecteur » me dérange un peu. Au départ, je pense qu’il faut « écrire ce qu’on a envie de lire », comme dirait Toni Morrisson. Si on pense dès le départ au lecteur, on va écrire un truc « pour plaire » et ça va être mauvais. Bien sûr, il faut y penser une fois qu’on a terminé de relire plusieurs fois et qu’on va l’envoyer à ses bêta-lecteurs. Mais pas au début.

Entre la dernière page du premier jet et le manuscrit finalisé, quel est ton processus éditorial avant l’envoi à un maison d’édition ?

Une fois que j’ai mon premier jet, que toute mon histoire se tient d’un bout à l’autre, je suis les conseils de Stephen King, et je laisse reposer mon manuscrit plusieurs semaines. Ensuite, je relis tout dans un sens, puis… dans l’autre. J’avais lu ce conseil que j’avais trouvé farfelu avant de le tester, et même si c’est un peu étrange de lire son roman en partant de la fin, cela permet de remarquer beaucoup de fautes ou maladresses d’écriture qu’on ne voit pas quand on le lit « à l’endroit » (inconsciemment, même si on fractionne la correction, quand on sent la fin arriver, on bâcle). Ensuite, je l’envoie à plusieurs bêta-lecteurs. L’un est intraitable sur l’orthographe et la grammaire, une autre regarde la cohérence du récit, le rythme etc. Une fois que j’ai eu ces retours, que j’ai fait les corrections nécessaires, j’envoie mon manuscrit.

Dans ton roman, à travers les voyages, il est question de la place de l’emploi dans une vie, de la découverte de cultures mais aussi des autres, de l’amour et de soi-même. Qu’est-ce qui t’a inspiré ces sujets ?

Au tout départ, il y a l’épisode d’une vieille série, Les deux font la paire. Les personnages principaux y enquêtent sur un bateau de croisière. Ils doivent faire semblant d’être un couple. En bonne fan de comédies romantiques, je me suis dit que ça serait amusant de « forcer » deux personnages qui ne s’apprécient pas vraiment à cohabiter dans la même cabine avec, au bout, bien entendu, une histoire d’amour. De cette idée de départ, très vague fanfiction donc, j’ai eu une première scène qui m’est venue, puis je me suis demandée comment ils en étaient arrivés à ce moment, et ce qui se passait après. Ensuite, j’ai déroulé le fil de mon histoire et assemblé les pièces du puzzle.

Je trouvais intéressant aussi, de confronter mon héroïne à une situation de rêve, mais dans laquelle elle ne se sentirait pas à sa place, à savoir se retrouver « coincée » avec le tombeur de ces dames, situation que beaucoup envieraient mais qu’elle regarderait avec septicisme, ne se sentant, du fait de ne pas avoir un physique de top model, pas du tout à sa place. Je tenais à ce que mon héroïne soit ronde, parce que je le suis moi-même et que nous sommes sous-représentées, ou alors sous la forme de la bonne copine ou de la pauvre fille mal dans sa peau. Ici Julia n’est pas franchement mal dans sa peau mais elle a conscience de ne pas rentrer dans certaines cases. Elle a un caractère bien trempé, ce n’est pas la bonne grosse toujours gentille. Elle ne se juge pas à sa juste valeur.

Concernant la place de l’emploi, il me semble que la vie est trop courte pour rester dans un emploi alimentaire. Personnellement, la routine me terrifie. J’ai bien conscience que dans bien des cas, on n’a pas le choix et qu’il faut bien gagner sa vie, mais je crois viscéralement que si une porte s’ouvre pour sortir de cette situation, il faut la prendre. J’ai toujours eu une passion pour les voyages, et ce métier de « testeur de voyage », qui existe bel et bien, me semblait une profession de rêve. J’avais envie d’un roman qui permette de s’évader dans tous les sens du terme. Et s’il peut faire réfléchir à sa propre situation, tant mieux !

3 questions sur l’édition

As-tu rencontré des obstacles avant de trouver un éditeur pour ce roman ? Si oui, lesquels ?

J’ai essuyé quelques refus mais City Éditions m’a assez vite ouvert sa porte. L’obstacle principal, pour moi, est l’envoi du manuscrit sous forme papier. Cela coûte cher en impression, reliure, envoi, tout ça pour se retrouver au pilon ou bien le retourner à ses frais. Heureusement, beaucoup de maisons d’éditions procèdent par email à présent.

Quel refus t’a fait le plus de peine et quelle leçon en as-tu tirée ?

La première maison d’édition m’a envoyé une lettre manuscrite pour m’expliquer que mes personnages n’étaient pas assez travaillés, qu’ils étaient superficiels. Sur le coup, j’étais heureuse de savoir qu’ils l’avaient vraiment lu et pris le temps de répondre de façon personnelle (c’est rare). Mais quand j’y pense, je trouve ça un peu injuste et snob, je l’avoue ! Et je ne suis pas d’accord. Mon roman est léger, certes, mais j’ai travaillé mes personnages. Après, par définition, un avis est subjectif donc je ne le prends pas mal, c’est le jeu.

Quelle stratégie marketing qui te semblait être une bonne idée s’est avérée pas si efficace ?

Les salons du livre sont intéressants pour discuter avec d’autres auteurs, mais ce n’est pas très rentable. Je ne suis pas forcément à l’aise dans la position de vendeuse. Si on vend 5 livres en une journée c’est un bon score. Par ailleurs, des proches ont envoyé mon roman à des connaissances « qui aiment lire » ou « ont des blogs » sauf que mon livre n’était pas leur genre du tout, et qu’ils ont pris la peine de mettre un avis… négatif. Je pense qu’envoyer son livre à tout va c’est se tirer une balle dans le pied. Il vaut mieux lui donner une chance en l’envoyant à des personnes qui pourraient l’aimer. Au moins, ils n’auront pas d’a priori négatif.

Coralie Raphael
Coralie Raphael

Je parle beaucoup d'auto-édition et essaie d'aider les auteurs à comprendre dans quoi ils mettent les pieds. Parfois j'écris aussi des livres.
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