Ajouter quelques scènes de combat peut sembler un moyen facile d’ajouter un peu de piquant à un roman. Mais en réalité, la violence peut être incroyablement difficile à mettre en œuvre efficacement.
Les auteurs tombent dans de nombreux pièges quand ils écrivent une scène violente. On va voir quels sont ces pièges, comment les éviter, et deux méthodes qui, selon moi, fonctionnent pour quatre-vingt-dix pour cent des scènes de combat.
Violence : la méthode détaillée
Si vous écrivez une scène de combat dans le cadre d’une fiction populaire, la description détaillée est la meilleure solution neuf fois sur dix. Une scène de combat, quelle qu’en soit l’ampleur et la durée, impliquera probablement deux personnes ou plus, liées par un processus incroyablement rapide et complexe. La description détaillée sert à guider le lecteur à travers la confusion et l’aide à se laisser embarquer.
Une scène de combat pas terrible :
Benoît a désarmé le garde et tué les sept hommes derrière lui.
Comment a-t-il fait ça, seul contre huit assaillants ? Il a claqué des doigts et ils sont tous tombés raides morts ?
Vos lecteurs doivent croire que votre héros aux allures de James Bond se soit débarrassé de deux cents hommes de main surentraînés, malgré ce que leur cerveau leur dit.
Le combat doit être détaillé et s’enraciner dans des actions concrètes. C’est d’autant plus vrai s’il s’agit d’un protagoniste un peu paumé qui fait face à des obstacles impossibles à surmonter. Après tout, pour que le lecteur reste immergé dans votre roman, il doit être capable de croire aux événements de l’histoire. Si ces événements sont trop grotesques, c’est fini : vous avez perdu vos lecteurs.
Prenez, par exemple, cette scène tirée du roman Loup blanc de l’écrivain David Gemmell :
Quand le coup mortel était arrivé, cela avait été si rapide que beaucoup de témoins ne l’avaient pas vu. Agasarsis avait attaqué, Skilgannon avait bloqué le coup en faisant rouler sa lame autour de celle d’Agasarsis. Les deux hommes avaient bondi en arrière. Soudain, du sang avait giclé de la jugulaire tranchée d’Agasarsis. Le champion avait essayé de rester debout, mais ses jambes s’étaient dérobées, et il était tombé à genoux devant celui qui l’avait tué. Servaj avait compris qu’au moment où il parait le coup Skilgannon avait coupé la gorge de son adversaire avec l’extrémité de son épée.
Agasarsis était tombé face contre terre.
Chaque mouvement et détail est décortiqué, ralenti et raconté par un témoin de la scène. Cette rencontre donne une fin frappante et en apothéose.
C’est pour cette même raison que les films d’action privilégient le ralenti et un montage précis. Les actions incroyablement complexes et improbables présentées doivent être ralenties et examinées pour être crues. Imaginez si, dans The Matrix, Neo et Trinity arrivaient simplement pour sauver Morphée et lui disaient « Oh oui, nous avons tué ces cinquante gardes en bas. Pas de problème. » Non, il faut le voir pour le croire. Et c’est un peu la même chose pour les livres.
Violence : la méthode implicite
La méthode alternative pour écrire une bonne scène de violence ne fonctionne que dans certaines situations. Elle est privilégiée dans les romans littéraires et les romans policiers. Cette méthode s’articule autour du non-dit, comme la mort de Myrtle dans le roman de F. Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique :
L’instant d’après, elle s’élançait dehors dans le crépuscule, en agitant les mains et en criant – avant qu’il pût quitter le seuil de sa porte, la chose s’était produite.
L’« auto tragique », comme l’appelèrent les journaux, ne s’arrêta pas ; elle sortit de l’obscurité grandissante, hésita dramatiquement, un instant, puis disparut au premier tournant.
Le moment précis de la mort de Myrtle est inconnu. On ne voit pas l’impact, on n’entend pas de cri, et pourtant nous savons avec certitude que Myrtle est morte. Ce type de violence silencieuse gagne en puissance grâce à sa sobriété, et dépend totalement de la force du contexte. Quand vous écrivez un moment de violence implicite, votre prose doit bouillir. Il vous faut des phrases courtes et percutantes et des images concrètes évocatrices.
C’est comme dans un film, quand la porte se referme sur l’homme attaché à la chaise dans le repaire de la mafia. La scène se coupe, et bien que nous ne voyions rien, nous savons tous que ça va mal aller pour lui.
Voilà pour les méthodes. Réduire une bonne scène de violence à deux règles peut sembler assez restrictif, vous pouvez penser qu’il n’y a pas de place pour un juste milieu.
Mais, bien sûr, les grands auteurs trouveront toujours le moyen de faire fi de ces règles et directives, alors ne vous sentez pas obligé de vous limiter. L’écriture est un art, pas une science exacte, et il y a toujours de la place pour l’expérimentation. Mais pour enfreindre les règles, il faut d’abord les connaître.