Le Plot Planner est un outil visuel que je trouve utile pour organiser des romans, des mémoires, de la non-fiction, des scénarios, etc. C’est un excellent outil pédagogique pour planifier, rythmer, suivre, tester, corriger et affiner une intrigue. On peut voir ça comme un pont entre le monde invisible de la créativité et le monde visible des cinq sens.
Cet article présente les avantages du Plot Planner, les formes sous lesquelles il apparaît et la manière dont il est lié au développement de l’intrigue et des personnages.
Les avantages du Plot Planner
Un Plot Planner vous aide à visualiser votre histoire. Vous pouvez l’utiliser pour :
- Placer vos idées et séquencer vos scènes pour obtenir l’effet désiré.
- Tester des changements dans l’intrigue ou la présentation pour susciter une réaction et un intérêt plus forts chez le lecteur.
- Vous faire une idée du rythme de votre histoire.
- Montrer à quelqu’un où vous avez besoin d’aide pour votre intrigue.
- Trouver des idées pour mieux développer votre histoire.
- Renforcer votre compréhension des éléments essentiels de l’histoire.
- Vous assurer de bien comprendre l’histoire que vous présentez.
Plus important, le Plot Planner vous donne une vue d’ensemble de l’histoire quand vous êtes concentré sur l’écriture d’une scène. Il vous permet d’élaborer une histoire qui transmet votre message aux lecteurs de manière convaincante et significative.
Les deux formes du Plot Planner
Le Plot Planner peut prendre deux formes différentes. Dans les deux cas, vous pouvez voir que la ligne s’élève régulièrement : elle construit votre histoire lentement et méthodiquement à mesure que la tension augmente. Chaque scène offre plus de tension et de conflit que la précédente et l’intensité augmente jusqu’au point culminant de votre histoire.
Forme 1
Forme 2
Le Plot Planner ressemble à la crête d’une vague. En général, la structure d’une nouvelle se construit en une vague géante dans laquelle la crise sert de point culminant à l’histoire (forme 1). Les romans, les mémoires, les œuvres de non-fiction et les scénarios ont deux points culminants : la crise et l’apogée.
Dans le second cas, la crise et l’apogée sont deux scènes distinctes (forme 2). Là encore, il n’y a pas de règle : utilisez la forme du Plot Planner qui convient le mieux à votre histoire.
Le flux d’une histoire émane de l’action dramatique, du développement émotionnel des personnages et de la signification thématique. Les Chinois appellent ce flux humain qi. Le qi dirige et coordonne le flux d’énergies et constitue le pilier de la force vitale d’une personne. Le qi ne peut être ni vu ni touché, mais il est intrinsèquement présent en toute chose.
Une histoire parle d’événements qui se produisent dans la vie des gens et dans le monde qui les entoure. Elle est donc constituée d’énergie. L’énergie d’une histoire ne reste pas plate, tout comme la ligne du Plot Planner. L’intensité d’une histoire augmente, ce qui se traduit par une ligne de plus en plus haute au fur et à mesure que les enjeux et l’énergie de l’histoire deviennent importants.
Les personnages bougent et provoquent des événements. La tension monte. Chaque scène comporte plus de conflits que la précédente. Chaque défaite subie par le personnage est plus cuisante, et crée des obstacles de plus en plus difficiles à surmonter, comme le montre la direction de la ligne du Plot Planner.
Au-dessus et au-dessous des lignes
Dans chaque grande histoire, un protagoniste avance vers son objectif, tandis que des forces internes et externes tentent de contrecarrer ses plans. Cette lutte entre le protagoniste et les antagonistes fait monter en flèche l’énergie de votre histoire. Plus les antagonistes sont puissants et redoutables, plus l’intensité, le drame et l’effervescence de la scène sont importants.
Les antagonistes appartiennent à l’une de ces six catégories :
- Un autre personnage : famille, amis, collègues de travail, ennemis, amoureux
- Nature : ouragans, tremblements de terre, inondations, loi naturelle, handicaps physiques
- Société : institutions religieuses, gouvernement, coutumes, gangs
- Machine : voitures, robots, vaisseaux spatiaux, motos
- Dieu : croyances spirituelles
- Protagoniste : vie intérieure, erreurs passées, peurs, défauts, doutes, choix moraux, volonté
La lutte principale de l’histoire se déroule entre le protagoniste, qui désire suffisamment quelque chose pour agir contre vents et marées, et le ou les antagonistes ou les forces à l’intérieur et à l’extérieur du protagoniste qui sont contre lui.
Quel est le rapport avec le Plot Planner ? À la base, le Plot Planner est simplement une ligne qui sépare les scènes faites de conflit et d’effervescence (qui apparaissent au-dessus de la ligne) de celles qui sont passives, faites de sommaires et d’événements passés ou chargées d’informations (qui apparaissent au-dessous de la ligne). Plus important encore, la ligne du Plot Planner sépare les scènes entre celles (au-dessus) où l’énergie, le pouvoir ou le contrôle sont entre les mains de l’antagoniste, forçant le protagoniste à réagir et celles (au-dessous de la ligne) où le protagoniste contrôle l’action ou a un avantage sur l’antagoniste.
En plaçant les idées au-dessus ou au-dessous de la ligne du Plot Planner, vous tracez une carte visuelle qui vous permet d’analyser les informations essentielles de l’histoire, le déroulement de la présentation et les faiblesses de la séquence globale de votre histoire. Vous êtes également en mesure de suivre la montée et la descente de l’énergie de votre histoire.
Au-dessus de la ligne
Au-dessus de la ligne, c’est un peu comme la surface de la mer avec la houle, l’écume et les vagues. C’est le territoire palpitant de l’action dramatique où votre protagoniste est hors de contrôle, craintif, perdu, confus ou sous l’emprise d’un antagoniste. Toutes les scènes qui présentent des complications, des conflits, de la tension, des dilemmes et du suspense, où le protagoniste est tenu éloigné de ses objectifs vont au-dessus de la ligne.
En résumé, les scènes qui montrent une action où le pouvoir est ailleurs qu’entre les mains du protagoniste se placent au-dessus de la ligne du Plot Planner. Elles peuvent prendre les formes suivantes :
- tension
- conflit
- suspense
- catastrophe
- l’inconnu
- trahison
- être chassé ou poursuivi
- tromperie
- vengeance
- rébellion
- persécution
- rivalité
- complot
- action criminelle contre le protagoniste
- suspicion
Les scènes qui montrent le développement émotionnel d’un personnage, sous les formes suivantes, ont également leur place au-dessus de la ligne du Plot Planner :
- défaite
- incapacité à faire face aux événements
- vengeance
- abnégation
- perte de contrôle
- colère, rancœur
- mauvaise décision
- chagrin
- acte criminel commis par le protagoniste
- peur
- rébellion
- avidité
- malheur
- défaut
- perte de pouvoir
Au-dessous de la ligne
Sous la ligne du Plot Planner se trouve le mystère. Les scènes qui y ont leur place sont celles qui montrent le contre-courant : le territoire interne et émotionnel du protagoniste. Une grande partie du développement émotionnel du personnage est placée sous cette ligne, car le développement du personnage est souvent révélé par son introspection. Toute scène qui ralentit l’énergie de l’histoire ou dans laquelle le pouvoir revient au protagoniste doit être placée sous la ligne.
Les scènes où le protagoniste est proactif plutôt que réactif, où il décide du meilleur plan d’action pour atteindre ses objectifs et le met en œuvre, se situent sous la ligne du Plot Planner. Ces scènes peuvent prendre les formes suivantes :
- une accalmie dans le conflit, la tension et le suspense
- un partage d’informations avec le lecteur en racontant plutôt qu’en montrant (du fameux show don’t tell).
Les scènes dans lesquelles le protagoniste se comporte de façon suivante ont également leur place sous la ligne du Plot Planner :
- reste calme
- fait face aux événements
- résout les problèmes
- garde le contrôle
- planifie
- fait une introspection
- contemple
La structure d’une histoire
Il est essentiel de comprendre la structure d’un roman pour utiliser au mieux le Plot Planner. Une histoire peut généralement être divisée en trois parties : le début, le milieu et la fin. Mais n’oubliez pas : les règles sont faites pour être transgressées.
Partie 1 : le début
La première partie de l’histoire commence à la page 1. Elle représente environ 25% de l’ensemble du récit. La première partie se termine généralement par une scène ou un ensemble de scènes charnières appelé la fin du début. On trouve souvent facile d’écrire soixante-quinze premières pages convaincantes, mais on a du mal à maintenir l’élan au-delà de la fin du début.
Partie 2 : le milieu
Le milieu est la partie la plus longue de l’histoire (environ 50% de l’ensemble du récit) et contient le plus de scènes. C’est là que parfois, ça coince. Découragé par le long travail qui reste à faire, on abandonne. La deuxième partie se termine généralement peu après que le personnage ait atteint le faux sommet de son ascension, la crise.
La crise, c’est là où l’énergie de l’histoire atteint temporairement son point culminant, et c’est là que la tension et le conflit sont les plus forts. En affrontant sa plus grande peur, douleur, déception, ou encore un choc, une trahison ou un échec totalement inattendus, le protagoniste doit se remettre en question pour la première fois. C’est un tournant majeur. Le protagoniste va-t-il ignorer cet avertissement ? Ou va-t-il ressortir grandi et changé de cette crise ? Comme je l’ai mentionné plus haut, si vous écrivez une nouvelle, la crise peut être le point culminant de l’œuvre. Dans les nouvelles, en général, il ne doit y avoir qu’un seul point culminant.
Dans un roman, quand le protagoniste est frappé par la crise, l’histoire n’est pas terminée (la crise est un faux sommet). Mais une fois arrivé à la crise, le véritable sommet devient visible. Le creux visible sur la forme 2 du Plot Planner est là où l’énergie de l’histoire chute pour donner au lecteur le temps de respirer après l’effervescence de la crise et avant que le protagoniste n’entreprenne le voyage vers le point culminant.
Partie 3 : la fin
La fin de l’histoire est constituée des derniers 25% de l’ensemble du récit. La fin se compose de trois parties : l’approche du point culminant, le point culminant lui-même et la résolution.
L’approche de l’apogée : le protagoniste arrive à la fin de l’histoire plus sage, après avoir essuyé le revers de la crise. L’objectif qu’il se fixe à la fin détermine l’action dramatique dans les scènes qui mènent au point culminant. Ce même objectif détermine également les antagonistes qu’il rencontrera sur son chemin. Il est plus fort et plus sage maintenant. Il en va de même pour les antagonistes déterminés à se mettre en travers de sa route.
L’apogée : ce point est similaire à la crise, car il s’agit d’un autre tournant majeur. Le protagoniste a eu l’occasion de se remettre en question pendant la crise, maintenant il doit montrer si et comment il a effectivement grandi, changé et appris. Après la crise, le protagoniste peut dire avec conviction qu’il ne sera plus jamais le même. Mais c’est bien beau de le dire, il faut aussi agir. Au fond de nous, nous avons tous une tendance naturelle à résister au changement, préférant nous accrocher au confort de ce qui est familier. S’étirer, grandir et changer implique d’aller vers l’inconnu. Plutôt que de risquer la possibilité d’un échec, la plupart d’entre nous préfèrent ne rien essayer. L’apogée implique une action qui oblige le protagoniste à montrer au lecteur ce qu’il est réellement devenu, après avoir vécu tout ce qui lui est arrivé au cours de l’histoire.
Les vieilles habitudes ont la vie dure. Un personnage qui a été mis dans une situation conflictuelle et tendue va d’abord retomber dans ses vieilles habitudes. Le suspense augmente. Le lecteur sait que le protagoniste a juré qu’il avait changé. Va-t-il agir en conséquence ?
La résolution : c’est là où on règle les derniers détails. Toutes les intrigues secondaires n’ont pas besoin d’être résolues à la fin de l’histoire, mais les plus importantes doivent l’être. Concluez de manière à donner une signification thématique à l’ensemble du récit.
Derniers conseils pour élaborer une intrigue
- L’intrigue, c’est une question de rythme, mais c’est aussi l’action dramatique et la transformation qui s’opère chez le personnage. Pour satisfaire vos lecteurs, la disposition et le rythme de chaque scène sont essentiels.
- Si vous consacrez trop de chapitres ou de pages au début du texte, vous risquez de perdre votre lecteur dès le départ. Les lecteurs veulent être ancrés dans l’histoire, ils veulent comprendre qui est qui et ce qui se passe, puis ils s’attendent à ce qu’un événement important se produise.
- L’équilibre entre les événements passés et ceux en cours, entre le dialogue interne et l’action manifeste, entre le développement du personnage et l’action est délicat. Gardez toujours cet équilibre à l’esprit.
- Vous écrivez votre histoire dans un certain ordre mais la scène, le sommaire ou la narration ne sont pas obligés de suivre cet ordre.
- Vous contrôlez la disposition et le rythme des scènes. Ils sont essentiels à l’intrigue, et sont mieux vus et compris à l’aide du Plot Planner.