L’usage stratégique du livre gratuit

Le livre gratuit est-il une mauvaise chose pour les auteurs ? La réponse courte est non. Pour la réponse développée, continuez de lire.

À quelle étape de l’entonnoir êtes-vous ?

C’est la question-clé que chaque auteur faisant preuve de stratégie doit se poser. L’entonnoir, c’est le chemin qu’empruntent les lecteurs du moment où ils ont conscience que vous existez à celui où ils deviennent fans.

Le livre gratuit est populaire pour une bonne raison ; c’est un moyen classique et sans friction de faire connaître votre travail. N’importe quelle industrie a sa façon d’exploiter la gratuité à son avantage. Et particulièrement celle du développement de jeux vidéo, de logiciel et d’applications. Si vous pouvez rassembler un nombre suffisant de personnes et qu’elles aiment le livre que vous leur avez offert, vous pouvez leur vendre d’autres choses une fois que la confiance s’est installée entre vous.

Si vous avez déjà vu le film Glengarry, c’est la même idée que dans le discours du personnage joué par Alec Baldwin. A-I-D-A. D’abord, il faut obtenir l’attention des gens (à travers une pub, un cadeau, une couverture médiatique, peu importe). Puis susciter l’intérêt. Et si tout va bien, viennent ensuite le désir et l’action d’acheter.

Je ne pense pas qu’il soit utile de discuter du livre gratuit de manière abstraite (ou de le diaboliser). Parce qu’à moins de le considérer au cœur de la stratégie d’un auteur à un moment précis, il est impossible d’évaluer son efficacité correctement. Si un livre gratuit mène à des fans qui achètent vos autres ouvrages par la suite, c’est cool. Si ça mène à rien de leur part, alors c’est à revoir.

Je ne crois pas qu’un livre gratuit pousse les gens à espérer que tous les autres le soient aussi. Quand on nous offre un morceau de fromage à goûter au supermarché, on ne s’attend pas à emporter le fromage en entier sans payer. Quand on se considère comme fan d’un auteur, on peut espérer un petit prix au lancement d’un livre en pré-commande. Mais pas toujours de la gratuité.

S’il y a un problème avec le livre gratuit, c’est surtout dans la communauté de l’auto-édition. Il peut arriver que vous attiriez des lecteurs qui n’en ont strictement rien à carrer de vous. Des lecteurs qui cherchent seulement à lire à l’œil. En d’autres mots : le livre gratuit peut attirer des lecteurs peu intéressants. Mais elle en attire aussi des très intéressants. C’est comme en entreprise. Certaines pistes mènent vers de bons clients. D’autres non. Les auteurs qui ont le sens des affaires apprennent avec le temps où et comment se servir de livres gratuits et ainsi augmenter le nombre de bons lecteurs et réduire celui des moins bons.

Quelle est votre courbe de demande ?

Le livre gratuit est un des outils les plus puissants dans l’arsenal de l’auteur débutant parce que c’est un excellent moyen d’obtenir de l’attention. C’est peut-être même le seul que vous ayez. Il n’y a pas encore de demande pour vous. Si vous n’avez pas d’éditeur pour vous soutenir, il est particulièrement important de fournir une preuve sociale aux lecteurs potentiels ou d’avoir un moyen de leur montrer votre mérite avant qu’ils n’investissent du temps ou de l’argent dans votre travail. (Les services de presse, votre présence sur les réseaux sociaux, etc. tout ce qui peut montrer votre travail mérite votre attention.)

Et les auteurs plus connus, doivent-ils distribuer des livres gratuits ? La stratégie perma free (pour permanently free) est un outil marketing qui a fait ses preuves. Ça consiste à rendre le premier livre d’une série (ou n’importe lequel de vos livres si vous en avez beaucoup) gratuit de façon permanente pour qu’il deviennent ainsi une drogue de passage vers le reste de vos livres.

Là où c’est un problème pour les auteurs indépendants, c’est quand ils n’ont qu’un ou deux livres à vendre et qu’ils n’ont rien d’autre à offrir aux lecteurs. Et pire, ils n’établissent aucun plan pour les contacter (newsletter ou réseaux sociaux). Donc il n’y a aucun entonnoir ou aucun chemin à suivre pour les lecteurs. C’est une impasse. Le fan potentiel finit le livre et… vous le perdez. Peut-être qu’il trouvera votre prochain livre si vous en sortez un. Peut-être pas.

L’autre point important c’est que votre travail doit être de qualité pour répondre aux attentes de votre audience. Si ce n’est pas le cas, peu importe le nombre de livres gratuits que vous distribuerez, il ne se passera rien. Quand l’échantillon de fromage n’est pas bon, vous n’en reprenez pas, n’est-ce pas ?

Le mot de la fin

Le livre gratuit peut faire partie d’un contenu plus large ou d’une stratégie marketing. Ne vous en servez pas sans analyser votre entonnoir et votre courbe de demande. Si vous avez des fans qui raffolent votre travail, ils ne chercheront pas à obtenir tout gratuitement. Et d’ailleurs, une fois que vous aurez une communauté de fans, ils seront à la recherche d’expériences plus précieuses qu’un livre gratuit.

Plutôt que de montrer du doigt une communauté que vous suspectez de ne pas chérir votre dur labeur, demandez-vous pourquoi ce que vous offrez ne semble pas mériter qu’on y dépense de l’argent. Quand les gens ne paient pas, il y a une explication rationnelle. Ils paient pour quelque chose s’ils y croient.

Coralie Raphael
Coralie Raphael

Je parle beaucoup d'auto-édition et essaie d'aider les auteurs à comprendre dans quoi ils mettent les pieds. Parfois j'écris aussi des livres.
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2 commentaires

  1. Très intéressant cet article. C’est vrai que le gratuit est partout autour de nous. Si les entreprises utilisent cette stratégie, c’est qu’elle y trouvent leur compte a un moment.
    C’est intéressant pour faire connaître son livre, pour donner envie, etablir la confiance

  2. Bon ça va, je pense donner de bons petits bout de fromage quand même. Ce sont des guides et des chapitres de fanfictions crossover avec mon univers. Les gens voient comment je travaille mais je ne donnerai pas tout, faut pas croire, hein ! ^^

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